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expiation suffisante de son désir et de son génie de plaire. Quand la mode prenait la livrée de cette reine blonde, et baptisait ses milles fan fioles couleur cheveux de la Reine, cette flatterie était imputée à crime à Marie-Antoinette. Et c’était encore un autre de ses crimes, l’importance de mademoiselle Bertin, de cette marchande de modes que la Reine n’avait fait que recevoir des mains de la duchesse d’Orléans, et former à l’école de son goût.

L’hiver, après des déjeuners intimes où elle rassemble à sa table les jeunes femmes de la cour, la Reine entraîne la jeunesse derrière son traîneau, et prend plaisir à voir voler sur la glace mille traîneaux qui la suivent. Les courses en traîneau font encore murmurer la censure.

La Reine aime le bal ; elle organise ces jolis bals travestis dont Boquet, le dessinateur des Menus, dessine les costumes d’une plume légère et d’un pinceau courant. Elle y préside avec une robe à grand panier, au fond blanc, tamponné d’une gaze d’Italie très-claire, relevé de draperies de satin bleu où courent en ramages des plumes de paon qui se retrouvent en grosse aigrette sur sa tête[1]. À côté d’elle, en chemise de gaze, sur fond chair, avec des draperies de satin vert d’eau écaillé sur un seul côté de la poitrine, la jupe relevée par des bouquets de roseaux, de coquillages, de perles, de corail, de franges d’eau, sa belle-sœur, la comtesse de Pro-

  1. Costumes d’opéras et travestissements de bals de cour. Dessins de Boquet dessinateur des Menus. Bibliothèque nationale, Cabinet des estampes.