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haltes, des incertitudes, des retraites, et même des échecs. M. de Maurepas avait un neveu terrible, qui manqua lui faire perdre la partie. Ce neveu, le duc d’Aiguillon, la Dauphine l’avait vu, donnant le bras à Madame du Barry, croiser le duc de Choiseul qui donnait le bras à la princesse de Beauvau, dans cette nuit du 10 au 11 mai 1770 où les partis se groupaient en se promenant sous les ombrages illuminés de Versailles. Depuis lors, Marie-Antoinette avait reconnu, à chacune de ses blessures, la main de M. d’Aiguillon. Disgracié le 2 juin 1774, l’ennemi de la Reine avait supporté de haut cette disgrâce. Assiégeant son oncle de conseils, le fatiguant de ses plans et de ses haines, gourmandant sa politique, dont il méprisait les douceurs et la diplomatie, il se disait retenu par M. de Maurepas qui l’empêchait d’aller à Véret, et s’embusquant à Paris où les fréquentes hépatites de madame d’Aiguillon, qu’il gouvernait, étaient une occasion et un prétexte de réunion pour le parti de son mari, M. d’Aiguillon montrait encore à Versailles sa figure jaune, et ne lâchait point la faveur du Roi qui continuait à travailler avec lui à l’occasion de la compagnie des chevau-légers. Il cajolait les entours de la Reine, lui faisant tenir, par-dessous mains, les avertissements et les confidences, cherchant à la désabuser de Choiseul, et à la faire revenir sur son compte, l’assurant par des tiers de son désir et de son ambition de l’éclairer sur ses vrais intérêts de souveraine ; pendant que tout haut il la peignait comme une femme entreprenante, inconstante,