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dit, un des derniers à droite. D’ailleurs, elle y fut comme appelée, du bout de la salle, par le sourire de Germinie, ce sourire des malades d’hôpital à une visite inattendue qui dit si doucement, dès qu’on entre : — C’est moi, ici…

Elle se pencha sur le lit. Germinie voulut la repousser avec un geste d’humilité et comme une honte de servante.

Mlle de Varandeuil l’embrassa.

— Ah ! lui dit Germinie, le temps m’a bien duré hier… Je m’étais figuré que c’était jeudi… et je m’ennuyais après vous…

— Ma pauvre fille !… Et comment te trouves-tu ?

— Oh ! ça va bien maintenant… mon ventre est dégonflé… J’ai trois semaines à être ici, voyez-vous, mademoiselle… Ils disent que j’en ai pour un mois, six semaines… mais je me connais… Et puis je suis très-bien, je ne m’ennuie pas… je dors maintenant la nuit… J’avais une soif quand vous m’avez amenée lundi !… Ils ne veulent pas me donner d’eau rougie…

— Qu’est-ce que tu as là à boire ?

— Oh ! comme chez nous… de l’albumine. Voulez-vous m’en verser, tenez, mademoiselle… c’est si lourd, leurs choses d’étain !

Et se soulevant d’un bras avec le petit bâton pendant au milieu de son lit, avançant l’autre mis à nu par la chemise relevée, tout maigre et grelottant, vers le verre que lui tendait Mlle de Varandeuil, elle but.