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velours cramoisi, avec le bonnet ducal et le grand manteau, le paludamentum attaché sur l’épaule gauche par un bouton d’or ; — voici les membres du Conseil des Dix, porteurs également de vêtements de pourpre ; — voici les sénateurs, habillés de la couleur nuée du plumage des paons, dans leurs manteaux aux grandes manches ouvertes et tombantes jusqu’aux jarrets, doublées de fourrures ; — voici les magistrats habillés de violet ; — voici « le grand capitaine », l’officier chargé de la police, avec les revers de son manteau de velours ornés d’entrelacs de cordonnets de soie, et son grand cimeterre.

Et c’est toute la noblesse de Venise : — c’est le baron, à l’habillement de drap d’or, dont les manches et les pans couverts de lames d’argent, à l’imitation de plumes d’oiseaux superposées, lui fait un costume éblouissant de lumière, « quand le soleil donne dessus » ; — c’est l’ancien noble, coiffé d’un berettino, d’un petit bonnet rond, où sur le devant des cordelettes forment une croix, marque distinctive d’une grande dignité, l’ancien noble, porteur d’un manteau ouvert d’un seul côté, donnant d’amples plis et de beaux cassements d’étoffes ; — c’est la matrone noble, ses cheveux bouclés épandus dans le dos, sous un manteau au collet de zibeline, dans une robe décolletée et balayant la terre, le corsage ornementé de délicates broderies, « s’harmonisant avec la chair de sa poitrine ; » — c’est une autre femme de la