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aux ramages d’or, apparaît en sa gloire, la tête renversée dans un mouvement d’orgueil, fouettée de vie aux pommettes, et comme fardée d’un jeune sang, sous les frisons de ses cheveux roux. Et la colorée et harmonieuse carnation de son visage, et la matité des blancheurs laiteuses de son cou et de la naissance de sa gorge, meurent dans la pénombre ambrée d’un pays de soleil.

Autour d’elle, et au-dessus de colonnades ayant les tons à la fois argentins et bleuâtres de l’étain, au-dessus de balcons peuplés de Vénitiennes, vêtues de robes pompeuses et chatoyantes, sont assemblées, dans l’azur du ciel, des femmes nues, les chairs délicatement animées et comme reflétées de nacre de perle, aux coudes et aux bouts des doigts roses, des femmes nues, au jeu de voluptueuses lumières le long de leur colonne vertébrale, aux balafres de soleil, çà et là, sur leur épidémie velouté, aux têtes abaissées sous leurs cheveux retroussés, ainsi qu’une chevelure de la Diane chasseresse, et tout papillotants d’auréolements d’or, aux oreilles découvertes montrant leurs petits lobes rondissants, aux fronts lumineux, aux longs cils sur leurs regards noyés, aux bas des visages, où est une bouche rouge et un menton charnu, perdus et retrouvés dans des ombres légères et chaudes, en une espèce d’embrasement des demi-teintes : — têtes de déesses qui ont l’air de têtes de courtisanes du ciel.