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hanches d’hermaphrodites. Et la dispute, et le partage, et la revision des âmes, se continuent au ciel, où il y a une hataille, au sujet de l'âme abominablement porcine d’un moine grassement entripaillé, qu’un diable tient par les cuisses, qu’un ange tire par les bras. Tout en bas de la composition est un chœur d’aveugles, d’infirmes, d’estropiés, de béquillards, demandant à la Mort de finir leurs maux, l’implorant dans ces vers :

Dà che prosperitade ci ha lasciati
Morte, medicina d’ogni pena
Deh ! a darne ormaï l’ultima cena.

Mais la Mort, sourde à leurs sollicitations, ne va qu’aux heureux, et c’est à la joyeuse cavalcade descendant sur la gauche de la peinture, qu’elle va offrir son image et l'annonce de sa venue.

Au pied d’une montagne, d’une Thébaïde, au haut de laquelle des moines prient, au-dessous d’un plateau où dorment deux cerfs, et où un lièvre fait chandelier, une joyeuse cavalcade de gentes damoiselles et de jeunes gentilshommes, le héron sur le poing, revient de la chasse, leurs varlets chargés de canards sauvages. Et voici qu’à leurs yeux se présentent trois cercueils : le premier, contenant un cadavre hideusement boursouflé ; le second, un cadavre, dont la pourriture a déjà mangé la figure ; le troisième, un cadavre, à peine habillé de quel-