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de la poésie burchiellesca (burlesque). L’authenticité de l’emplacement de cette dernière boutique est-elle bien authentique ? car, je crois qu’on n’a pour le retrouver rien que le dessin qui est à la Galerie Ducale, sous son portrait, et qui représente deux chambres, l’une ove si fa la barba, l’autre, où le poète est représenté jouant de la guitare, tout en mangeant. Ce poète-barbier, matricolato en 1408, dans le peuple de Santa-Maria Novella, à l’époque où la barbe était encore très respectée en Italie et fort peu touchée par le rasoir, vécut fort pauvre, mais tout pauvre diable qu’il était, sa boutique était le rendez-vous de tous les grands et gais esprits du temps : Acquetino da Prato, le prêtre Roselli d’Arezzo, Davanzati, le philosophe, le peintre, le sculpteur, Battista Alberti. Vraiment, ces jours-ci, c’était un amusant et élégant spectacle, que celui du va-et-vient dans le Corso, de ces équipages à la crinière des chevaux nattés avec des camélias, et traînant derrière eux les derniers et les plus beaux modèles de chasseurs que l’Europe possède, le va-et-vient des équipages de riches Américains, d’illustres Russes, de très charmantes Florentines : des équipages attelés à la Daumont avec deux postillons, des équipages de banquiers aux domestiques galonnés, comme les domestiques des pièces de Molière, et plus dorés et plus surdorés que les autres, de vrais