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Vraisemblablement, Anaxagore, comme le fait supposer sa doctrine du Nous, et comme nous avons eu déjà l'occasion de le remarquer, était très exigeant en fait de symétrie cosmique. Mais l'astronomie actuelle ne se contente pas simplement non plus, pour expliquer ce fait surprenant, d'admettre une irrégularité dans la distribution originelle de la matière. Elle cherche plutôt - comme autrefois le Klazoménien - sous cette extraordinaire irrégularité une simple illusion d'optique ; si ces astres nous paraissent si rapprochés, nous dit-elle, c'est que le système de la Voie lactée, auquel nous appartenons, présente une forme lenticulaire.

Dans le domaine de la météorologie, nous devons mentionne son explication des vents par des différences de température et de densité de l'air ; dans celui de la géographie, il rendit compte des crues du Nil en les rapportant à la fonte des neiges dans les montagnes de l'Afrique centrale. Cette supposition, au moins partiellement exacte, provoqua les moqueries de toute l'antiquité. En ce qui touche les commencements de la vie organique, Anaxagore suit les traces d'Anaximandre ; sa seule originalité consiste à faire précipiter sur la terre avec la pluie les premiers germes des plantes qui se trouvaient dans l'air avec les « semences » de toute nature. Cette doctrine, selon toute apparence, est en rapport avec la haute signification que notre sage attribuait a l'air pour toute la vie organique. N'a-t-il pas, par exemple, attribué aux plantes - sans se fonder sans doute sur des observations précises, - une sorte de respiration ? C'est lui aussi qui a découvert que les poissons respirent par des branchies. Pour lui, d'ailleurs, il n'y a pas d'abîme béant et infranchissable entre le règne végétal et le règne animal. Les plantes doivent, pour le moins, dit-il, éprouver des sensations agréables et des sensations désagréables, les premières durant leur croissance, les secondes au moment où elles perdent leurs feuilles. De même, pour lui, les divers degrés du monde animal n'étaient pas « séparés comme à coups de hache », et cependant sa théorie de la matière devait lui interdire tout pressentiment de l'évolution des espèces. Sa préoccupation - que nous avons déjà louée, mais qu'on ne saurait assez louer, - de ne pas entasser sans nécessité les différences spécifiques, l'a préservé de plusieurs des erreurs dans lesquelles sont tombés ses successeurs. Il ne reconnaissait dans les dons intellectuels que des différences de degré, puisqu'il faisait participer au Nous, en une mesure plus ou moins