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soit par esprit ou par matière pensante introduit dans sa signification un élément étranger 04 . C'est, d'après la propre déclaration d'Anaxagore, « la plus subtile et la plus pure des choses» ; « seule, elle n'est mélangée d'aucune autre chose, car si elle était mélangée à une autre chose quelconque, elle aurait (d'après ce que nous avons dit plus haut de la séparation incomplète des matières) part à toutes les autres, et ce mélange l'empêcherait d'exercer sur n'importe quoi la même puissance » qu'elle exerce maintenant dans son état de pureté. Selon des déclarations ultérieures, le Nous possède toute science sur toute chose, sur le passé, le présent et l'avenir, et le suprême pouvoir lui appartient. Mais si, d'après tout cela, on est tenté de l'identifier à la divinité suprême, on se trouve arrêté par d'autres et non moins importantes déterminations. Anaxagore parle d'un « plus et d'un moins » du Nous ; il le représente comme « divisible », et comme « inhérent à bien des choses », par lesquelles il entend tous les êtres vivants.

Deux mobiles très différents ont contribué à l'élaboration de cette doctrine, et se sont en même temps tenus réciproquement en échec. Tout ce qui, dans l'Univers, trahit l'ordre et la beauté, tout ce qui, par une habile adaptation à d'autres facteurs, fait l'impression d'un moyen approprié à un but, donne, l'idée d'une action consciente, d'un déploiement de forces intentionnel. En fait, l'argument téléologique ou de la finalité est encore a l'heure qu'il est l'arme la plus redoutable de l'arsenal du théisme philosophique. Mais si d'autres penseurs, après Anaxagore, ont jugé que cette mission ne pouvait être dignement remplie que par une essence dépouillée de tout élément matériel, il croyait, lui, qu'il suffisait pour cela d'une sorte de fluide ou d'éther ; c'est ainsi qu'Anaximène avait considéré l'air et Héraclite le feu