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magistrat éminent sortait de fonction, on l’accusait à tort ou à raison, et souvent à tort, d’avoir trahi les intérêts du pays, on demandait son exil ou sa condamnation à une forte amende ; ainsi, on flattait l’envie que provoque toujours dans une nation un homme haut placé et qui a, pendant quelque temps, exercé un grand pouvoir.

Avec un peuple ainsi travaillé par ses tribuns, et dénué de ressources, grâce à cette absence de commerce et d’industrie qui était le grand vice de la République romaine, on comprend que la classe appelée alors, fort à tort, aristocratique, avait à lutter continuellement ; mais elle trouvait un auxiliaire puissant là où l’on pouvait s’y attendre le moins, dans le tribunat même. Voici comment :

Il y avait dix tribuns du peuple ; or, pour que les propositions de l’un d’entre eux pussent acquérir force de loi, il fallait le consentement des neuf autres. Un seul tribun, en mettant son veto, c’est-à-dire en déclarant qu’il n’accepterait pas ce que proposaient ses collègues, et ce que voulait le peuple, arrêtait tout. La classe dite aristocratique, lorsqu’elle redoutait les menées d’un tribun, en était quitte pour gagner à prix d’argent ou autrement un