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plus populaire que le sien. Mais, parmi les actions qui lui firent donner le titre de sans peur et sans reproche, il en est qui sont peu connues, et qui cependant méritent de l’être tout autant que les autres ; car, pour être moins éclatantes, elles n’en sont pas moins dignes d’être louées et imitées.

Lorsque Bayard était en pays ennemi, il ne manquait jamais de payer avec la plus grande exactitude la dépense que lui et ses gens avaient faite là où ils avaient logé. Un jour, quelqu’un lui fit observer que l’argent qu’il donnait ainsi était argent perdu ; car, à peine serait-il parti, que la maison de ses hôtes allait certainement être brûlée et pillée. Sans se laisser séduire par ce raisonnement qui n’était que trop vrai, grâce à la manière barbare dont on faisait alors la guerre, Bayard répondit : « Messieurs, je fais ce que je dois, advienne que pourra ; Dieu ne m’a pas mis au monde pour vivre de rapine : qui sait d’ailleurs si ce pauvre homme, (parlant de son hôte) ne pourra aller cacher son argent au pied de quelque arbre ? Et quand la guerre sera hors du pays, il pourra s’en aider et priera Dieu pour moi. »