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nent, en général, à Hébé : franche, vive et imposante. Les traits de Sophie ne faisaient pas, au premier coup d’œil, autant d’impression : mais leur action était souvent plus sûre, tant ils avaient de douceur, de modestie et de charme ! l’une subjuguait d’un seul coup ; l’autre s’y reprenait à plusieurs fois et réussissait toujours.

Le caractère d’une femme semble généralement modelé sur le tour de sa physionomie : du moins, il en était ainsi chez mes filles. Olivia désirait plusieurs adorateurs ; Sophie n’en voulait fixer qu’un seul. Olivia tombait souvent dans l’affectation par trop d’envie de plaire ; Sophie cachait son mérite dans la crainte de blesser. L’une m’amusait, par sa vivacité, quand j’étais de bonne humeur ; l’autre, par son bon sens, quand j’étais sérieux. Mais, ni dans l’une ni dans l’autre, ces qualités n’allaient jusqu’à l’excès : et je les ai vues souvent changer de rôle, pendant toute une journée ; une robe de deuil faisait, de ma coquette, une prude : un nouveau nœud de ruban donnait, à sa jeune sœur, une vivacité surnaturelle.

George, mon fils aîné, étudiait à Oxford ; je le destinais à une des professions savantes. Mon second fils, Moïse, que je comptais mettre dans les affaires, recevait, chez moi, une sorte d’éducation mixte. Mais à quoi bon chercher à décrire le caractère particulier de jeunes gens qui n’avaient que fort peu vu le monde ? En somme, tous avaient un air de famille très-prononcé ; et, à proprement parler, chez tous même caractère : car tous étaient également généreux, candides, simples et inoffensifs.