plaire. L’inquiétude s’était profondément emparée de son âme, et sa beauté, déjà altérée avec sa constitution, allait, chaque jour, diminuant par le défaut de soins. Un seul mot de tendresse à sa sœur… et le cœur lui saignait, et ses yeux laissaient échapper une larme : c’est qu’un vice, bien qu’extirpé, dépose toujours le germe d’autres vices dans l’âme qu’il a souillée ; c’est que la première faute d’Olivia, bien qu’effacée par son repentir, avait laissé, après elle, la jalousie et l’envie.
Cent fois j’essayai d’adoucir ses ennuis ; j’oubliais mes propres souffrances en ne songeant qu’à la sienne ; j’empruntais à l’histoire tout ce que pouvaient me fournir de passages amusants et mon excellente mémoire et un peu de lecture. « Notre bonheur, ma chère, lui disais-je, dépend d’un être qui, pour le faire, a mille moyens imprévus avec lesquels il se joue de notre prévoyance ; s’il t’en faut une preuve, voici un fait, mon enfant, que nous raconte un historien grave, quoique parfois romanesque :
« Mathilde, mariée fort jeune à un gentilhomme napolitain de la plus haute naissance, se trouva veuve et mère à dix-neuf ans. Un jour, elle caressait son fils à la fenêtre toute grande ouverte de son appartement qui donnait sur le Vulturne ; l’enfant, par un mouvement soudain, lui échappe, tombe dans le fleuve qui baignait le palais, et disparaît à l’instant. La mère, éperdue, veut le sauver et plonge après lui ; mais, loin de l’atteindre, elle eut bien de la peine à regagner elle-même l’autre bord du fleuve, où des soldats français, qui pillaient le pays, la firent prisonnière.
« La guerre, que se faisaient alors les Français et les Italiens, était de la dernière atrocité. Mathilde allait donc subir à la fois tout ce que peuvent imaginer de plus horrible la passion et la cruauté. Heureusement un jeune officier s’opposa à cette lâche vengeance ; quoique obligé de faire prompte retraite, il prit Mathilde en croupe et la conduisit, saine et sauve, dans la ville où il était né. Elle avait, par sa beauté,