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COMÉDIE.

mon cœur bat… J’entrevois ma ruine. (Il ouvre et lit.)

Mylord,

Mon mari vient de m’ordonner tout-à-coup de le suivre dans le comté de Lincoln……

Est-il nécessaire qu’elle en fasse part à mylord Artur ? Pourquoi cette confidence ? En quoi cela peut-il l’intéresser ?


Vous savez que je laisse à Londres la plus chère partie de moi-même…

Hélas ! Je ne tiens donc plus le premier rang dans son cœur ! Qui n’ose usurper une place qui m’est due à tant de titres !


Votre bonté seule me console ; c’est en elle que j’ai mis toute ma confiance.

Ah ! les perfides me trahissent !


Je ne m’explique pas plus clairement, pour ne pas confier au papier un secret aussi important…

Non, le ciel ne permet pas que de pareils forfaits restent long-temps cachés.


Vous savez ce dont nous sommes convenus ce matin…

Perfide !


Et je me flatte qu’en conséquence, vous vous conduirez avec chaleur et prudence. Si vous venez au comté

    J’en atteste l’amour, dont tes perfides charmes
    Enivrent tous me sens ; j’en atteste les larmes
    Que m’arrache, aujourd’hui, le plus grand des forfaits :
    Ma rage égalera ton crime et mes bienfaits,
    Et toi, vil imposteur, dont la flamme odieuse
    Empoisonne mes jours d’une amertume affreuse,
    Tu te dis mon ami ! tu ne le fus jamais.
    Indignement trahi par tout ce que j’aimais
    Je vais, puisqu’il le faut, confondre la parjure,
    Poursuivre mon rival, et venger mon injure.

    Fin du second Acte.