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Comédie.

d’une foule de choses, ou fausses ou inutiles, il en a dit une bonne cependant, et je me bornerai à y répondre. Madame est veuve ; et avant de disposer de ces bonnes grâces, dont il vous plaît de supposer les Dames si libérales, elle est au moment peut-être d’éprouver cette espèce d’amour qui n’a qu’un objet.

Le Chevalier.

Madame le peut, et le possesseur fortuné de sa main pourra s’applaudir de la femme du monde la plus vertueuse. Il me semble, Madame, que le Comte n’est point étranger à l’état secret de votre cœur. Je ne puis que louer vos résolutions : mais je ne croyais pas mériter l’exclusion d’une pareille confidence.

Donna Eugénie.

Le Comte ne sait certainement rien de plus que vous.

Le Chevalier (au Comte.)

C’est donc en vain que vous jouez ici l’astrologue, pour décourager mes espérances.

Le Comte.

Pensez-vous qu’une veuve jeune, riche, et d’un grand nom, qui d’ailleurs est excédée des traitemens qu’elle reçoit ici, n’ait pas le projet de se remarier ?

Le Chevalier.

Elle est bien maîtresse de sa destinée. Madame, je ne pousse point l’audace jusqu’à deviner ; je désirerais cependant bien savoir…

Donna Eugénie.

Je ne veux point cacher la vérité à deux Cavaliers que j’estime. Ma position m’engage à former un second nœud.

Le Comte (au Chevalier.)

Eh bien ! mon astrologie est-elle si mal fondée !