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Comédie.

Scène IV.

LA FORÊT, ensuite LA BÉJART, ISABELLE.
La Forêt.


Éprouverait-il en effet des remords ? Peut-être bien. Une conscience troublée est si accessible à la peur ! Mais voici les deux rivales. (Elle ferme la porte de la chambre où est Pirlon.)

La Béjart.

Vous flattez-vous, Mademoiselle, que je ne sache pas interpréter jusqu’au moindre geste jusqu’au moindre mot ? Vos paroles, vos regards, rien ne m’a échappé. Moliere passait-il ? vous le regardiez tendrement. (Avec ironie.) Vos beaux yeux affligés lui décochaient à la sourdine de si tendres œillades ! vos lèvres de roses lui envoyaient des soupirs si touchans ! assise en face de ce cher tyran, c’étaient des mines, des contorsions à faire vomir. — Mais invente, épuise des ruses ; je les déjouerai toutes. Non, non ; ne crois pas me tromper ! mes yeux seront ouverts sur toutes vos démarches.

Isabelle.

Puis-je vous dire un mot ?

La Béjart.

Qu’aurez-vous l’audace de me dire ?

Isabelle.

Renfermez-moi dans un cloître pour le reste de mes jours.

La Béjart.

Vous renfermer dans un cloître ? chansons que tout cela, Mademoiselle. Il faut jouer la comédie, et vivre de votre état. Mais si tu veux te marier, l’honnête