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COMÉDIE.

Bonfil.

Le chevalier Ernold.

Majer (à Ernold.)

Que disaient-ils ?

Ernold.

Ma foi, je ne puis trop le savoir. Tout ce que je sais, c’est qu’on m’a fait faire une demi-heure d’antichambre, qu’on ne voulait pas me recevoir et qu’en me voyant entrer, malgré la défense expresse, Madame s’est fâchée, Monsieur s’est emporté contre moi ; et je regarde leur colère comme de fortes indices du crime dont on les accuse.

Majer.

L’impatience d’attendre, l’orgueil d’être mal reçu, tout cela peut vous les faire paraître tels. (À Artur.) Mylord, que faisiez-vous avec Madame ?

Artur.

Je m’efforçais de la consoler par l’espérance de voir bientôt son père réhabilité. Mylord Bonfil ne peut suspecter mon honnêteté ; il a assez de preuves de mon amitié pour lui.

Myladi (ironiquement.)

L’amitié de Mylord pouvait être intéressée : il aspirait sans doute à la possession de cette rare beauté.

Majer.

Le poison de la haine perce, Madame, dans ces expressions. Tous ces soupçons réunis n’établissent pas une semi-preuve.

Bonfil.

Si vous le permettez, Monsieur, je vais en fournir une qui suffit pour convaincre la perfide. Donnez-vous la peine de lire cet écrit.

Majer (prend la lettre, et lit tout bas.)