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Oh ! chante, tailladé par le couteau des pâtres
Et peint de la couleur magnifique du sang,
Ô roseau sensuel, ô flûte où je sens battre
Avec tant de chaleur un pouls si frémissant !

La femme convoitée est là, sous cette tente,
Qui t’écoute, comprend, tressaille et se contient.
Chante, dans le secret des caravanes lentes.
Quelqu’un qui te connaît mêle son rêve au tien.

Chante, le campement fume dans le soir grave
Où ton murmure monte ainsi qu’une oraison
Et le cheval obscur souffle sur ses entraves
Et la première étoile étonne l’horizon.

Sur le Zaccar éteint la Grande Ourse s’incline
Et, grâce à toi, toujours plus pensifs et plus beaux,
La Nuit et le Silence accoudés sur les ruines
T’écoutent grelotter à l’ombre des tombeaux.