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Une mélancolie affreuse et sans mémoire
Stagne aux plis de ce front couleur de parchemin
Où je ne sais quelle âpre et fatidique main
A durement gravé des secrets de grimoire.

Voici les jours sans pain, voici les nuits sans toit,
Voici ta courbature, ô race tant cinglée
Quand si loin de Sion tu roulais devant toi
       Des siècles de knout et d’onglée !

Ô charte douloureuse où s’étalent sans fin
Tous les crachats subis, toutes les hontes bues,
Le bagne, le ghetto, la chiourme, la faim
Et la répulsion des viandes défendues !

Je vois au coin des yeux où du feu s’attisa
La volonté tenace éterniser sa veille
Et, sans espoir, danser dans sa robe vermeille
       Salomé devant Spinosa !