Chez nous, chers lecteurs, cela soit dit sans vous fâcher (peut-être vous fâcherez-vous qu’un éleveur d’abeilles vous parle aussi familièrement qu’à son compère), chez nous, à la campagne, voici ce qui se passe de toute éternité : aussitôt que les travaux des champs sont terminés, le moujik grimpe pour tout l’hiver sur son poêle, et nous autres, nous cachons nos abeilles dans une cave obscure. Quand il n’y a plus une seule grue dans le ciel, plus une seule poire sur l’arbre, alors, aussitôt le soir arrivé, vous êtes sûrs d’apercevoir, au bout de la rue, une maisonnette éclairée d’où sortent des bruits de rires, de chansons qui s’entendent au loin ; la balalaika[1] résonne et quelquefois aussi le violon mêlés au brouhaha des conversations. Ce sont nos vetchernitsy[2]. Elles ressemblent, voyez-vous, à vos bals; seulement, on ne peut pas dire que ce soit tout à fait la même chose. Quand vous vous rendez au bal, c’est unique-