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Ils y consentirent. Tarass le conduisit à ses chariots près desquels se tenaient ses Cosaques.

— Allons, fourre-toi sous ce chariot, et ne bouge plus. Et vous, frères, ne laissez pas sortir le juif.

Cela dit, il s’en alla sur la place, où la foule s’était dès longtemps rassemblée. Tout le monde avait abandonné le travail des canots, car ce n’était pas une guerre maritime qu’ils allaient faire, mais une guerre de terre ferme. Au lieu de chaloupes et de rames, il leur fallait maintenant des chariots et des coursiers. À cette heure, chacun voulait se mettre en campagne, les vieux comme les jeunes ; et tous d’après le consentement des anciens, le kochévoï et les atamans des kouréni, avaient résolu de marcher droit sur la Pologne, pour venger toutes leurs offenses, l’humiliation de la religion et de la gloire cosaque, pour ramasser du butin dans les villes ennemies, brûler les villages et les moissons, faire enfin retentir toute la steppe du bruit de leurs hauts faits. Tous s’armaient. Quant au kochévoï, il avait grandi de toute une palme. Ce n’était plus le serviteur timide des caprices d’un peuple voué à la licence ; c’était un chef dont la puissance n’avait pas de bornes, un despote qui ne savait que commander et se faire obéir. Tous les chevaliers tapageurs et volontaires se tenaient immobiles dans les rangs,