Page:Gogol - Tarass Boulba, Hachette, 1882.djvu/77

Cette page n’a pas encore été corrigée

dirons une chose comme vous n’en avez jamais entendue, une chose de telle importance, qu’on ne peut pas dire combien elle est importante.

— Voyons, parlez, dit Boulba, qui aimait toujours à entendre l’accusé.

— Excellentissimes seigneurs, dit le juif, on n’a jamais encore vu de pareils seigneurs, non, devant Dieu, jamais. Il n’y a pas eu au monde d’aussi nobles, bons et braves seigneurs.

Sa voix s’étouffait et mourait d’effroi.

— Comment est-ce possible que nous pensions mal des Zaporogues ? Ce ne sont pas les nôtres qui sont les fermiers d’églises dans l’Ukraine ; non, devant Dieu, ce ne sont pas les nôtres. Ce ne sont pas même des juifs ; le diable sait ce que c’est. C’est une chose sur laquelle il ne faut que cracher, et la jeter ensuite. Ceux-ci vous diront la même chose. N’est-ce pas, Chleuma ? n’est-ce pas, Chmoul ?

— Devant Dieu, c’est bien vrai, répondirent de la foule Chleuma et Chmoul, tous deux vêtus d’habits en lambeaux, et blêmes comme du plâtre.

— Jamais encore, continua le long juif, nous n’avons eu de relations avec l’ennemi, et nous ne voulons rien avoir à faire avec les catholiques. Qu’ils voient le diable en songe ! nous sommes comme des frères avec les Zaporogues.

— Comment ! que les Zaporogues soient vos frères !