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tout cela pour violer la paix. Non, que Dieu m’en garde ! je ne dis cela que comme cela. En outre, le temple du Seigneur, chez nous, est dans un tel état que c’est pêcher de dire ce qu’il est. Il y a déjà bien des années que, par la grâce du Seigneur, la setch existe ; et jusqu’à présent, non seulement le dehors de l’église, mais les saintes images de l’intérieur n’ont pas le moindre ornement. Personne ne songe même à leur faire battre une robe d’argent[1]. Elles n’ont reçu que ce que certains Cosaques leur ont laissé par testament. Il est vrai que ces dons-là étaient bien peu de chose, car ceux qui les ont faits avaient de leur vivant bu tout leur avoir. De façon que je ne fais pas de discours pour vous décider à la guerre contre les Turcs, parce que nous avons promis la paix au sultan, et que ce serait un grand péché de se dédire, attendu que nous avons juré sur notre religion.

— Que diable embrouille-t-il ? se dit Boulba.

— Vous voyez, seigneurs, qu’il est impossible de commencer la guerre ; l’honneur des chevaliers ne le permet pas. Mais voici ce que je pense, d’après mon pauvre esprit. Il faut envoyer les jeunes gens sur des canots, et qu’ils écument un peu les côtes de l’Anatolie. Qu’en pensez-vous, seigneurs ?

— Conduis-nous, conduis-nous tous ? s’écria la foule

  1. Dans les anciens tableaux des églises grecques, les images sont habillées de robes en métal battu et ciselé.