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le vieux Tarass leur préparait une autre sphère d’activité. Une vie si oisive ne lui plaisait pas ; il voulait arriver à la véritable affaire. Il ne cessait de réfléchir sur la manière dont on pourrait décider la setch à quelque hardie entreprise, où un chevalier pût se montrer ce qu’il est. Un jour, enfin, il alla trouver le kochévoï, et lui dit sans préambule :

— Eh bien, kochévoï, il serait temps que les Zaporogues allassent un peu se promener.

— Il n’y a pas où se promener, répondit le kochévoï en ôtant de sa bouche une petite pipe, et en crachant de côté.

— Comment, il n’y a pas où ? On peut aller du côté des Turcs, ou du côté des Tatars.

— On ne peut ni du côté des Turcs, ni du côté des Tatars, répondit le kochévoï en remettant, d’un grand sang-froid, sa pipe entre ses dents.

— Mais pourquoi ne peut-on pas ?

— Parce que… nous avons promis la paix au sultan.

— Mais c’est un païen, dit Boulba ; Dieu et la sainte Écriture ordonnent de battre les païens.

— Nous n’en avons pas le droit. Si nous n’avions pas juré sur notre religion, peut-être serait-ce possible. Mais maintenant, non, c’est impossible.

— Comment, impossible ! Voilà que tu dis que nous n’avons pas le droit ; et moi j’ai deux fils, jeunes