toute la boutique d’une marchande inattentive. Ces boursiers composaient un monde à part. Ils ne pouvaient pas pénétrer dans la haute société, qui se composait de nobles, Polonais et Petits-Russiens. Le vaïvode lui-même, Adam Kissel, malgré la protection dont il honorait l’académie, défendait qu’on menât les étudiants dans le monde, et voulait qu’on les traitât sévèrement. Du reste, cette dernière recommandation était fort inutile, car ni le recteur, ni les professeurs ne ménageaient le fouet et les étrivières. Souvent, d’après leurs ordres, les licteurs rossaient les consuls de manière à leur faire longtemps gratter leurs pantalons. Beaucoup d’entre eux ne comptaient cela pour rien, ou, tout au plus, pour quelque chose d’un peu plus fort que de l’eau-de-vie poivrée. Mais d’autres finissaient par trouver un tel chauffage si désagréable, qu’ils s’enfuyaient à la setch, s’ils en savaient trouver le chemin et n’étaient point rattrapés en route. Ostap Boulba, malgré le soin qu’il mettait à étudier la logique et même la théologie, ne put jamais s’affranchir des implacables étrivières. Naturellement, cela dut rendre son caractère plus sombre, plus intraitable, et lui donner la fermeté qui distingue le Cosaque. Il passait pour très bon camarade ; s’il n’était presque jamais le chef dans les entreprises hardies, comme le pillage d’un potager, toujours il se mettait des premiers sous le commandement
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