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ne voyait plus à l’horizon que les deux cheminées encadrées par les sommets des arbres sur lesquels, dans leur jeunesse, ils avaient grimpé comme des écureuils. Une vaste prairie s’étendait devant leurs regards, une prairie qui rappelait toute leur vie passée, depuis l’âge où ils se roulaient dans l’herbe humide de rosée, jusqu’à l’âge où ils y attendaient une jeune Cosaque aux noirs sourcils, qui la franchissait d’un pied rapide et craintif. Bientôt on ne vit plus que la perche surmontée d’une roue de chariot qui s’élevait au-dessus du puits ; bientôt la steppe commença à s’exhausser en montagne, couvrant tout ce qu’ils laissaient derrière eux.

Adieu, toit paternel ! adieu, souvenirs d’enfance ! adieu, tout !


Les trois voyageurs cheminaient en silence. Le vieux Tarass pensait à son passé ; sa jeunesse se déroulait devant lui, cette belle jeunesse que le Cosaque surtout regrette, car il voudrait toujours être agile et fort pour sa vie d’aventures. Il se demandait à lui-même quels de ses anciens camarades il retrouverait à la setch ; il comptait ceux qui étaient déjà morts, ceux qui restaient encore vivants, et sa tête grise se baissa tristement. Ses fils étaient occupés