Page:Gogol - Tarass Boulba, Hachette, 1882.djvu/221

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Avec toi, seigneur polkovnik, avec toi ! s’écrièrent tous ceux qui faisaient partie du polk de Tarass.

Et ils furent rejoints par une foule d’autres.

— Eh bien ! puisque c’est avec moi, avec moi donc ! dit Tarass.

Il enfonça fièrement son bonnet, jeta un regard terrible à ceux qui étaient demeurés, s’affermit sur son cheval et cria aux siens :

— Personne, du moins, ne nous humiliera par une parole offensante. Allons, camarades, en visite chez les catholiques !

Il piqua des deux, et, à sa suite, se mit en marche une compagnie de cent chariots, qu’entouraient beaucoup de cavaliers et de fantassins cosaques ; et, se retournant, il bravait d’un regard plein de mépris et de colère tous ceux qui n’avaient pas voulu le suivre. Personne n’osa les retenir. À la vue de toute l’armée, un polk s’en allait, et, longtemps encore, Tarass se retourna et menaça du regard.

L’hetman et les autres polkovniks étaient troublés ; tous demeurèrent pensifs, silencieux, comme oppressés par un pénible pressentiment. Tarass n’avait pas fait une vaine prophétie. Tout se passa comme il l’avait prédit. Peu de temps après la trahison de Kaneff, la tête de l’hetman et celle de beaucoup d’entre les principaux chefs furent plantées sur les pieux.