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douze mille ducats ; j’en ajouterai douze encore, tous mes vases précieux, et tout l’or enfoui par moi dans la terre, et ma maison, et mes derniers vêtements. Je vendrai tout, et je vous ferai encore un contrat pour la vie, par lequel je m’obligerai à partager avec vous tout ce que je puis acquérir à la guerre !

— Oh ! impossible, cher seigneur, impossible ! dit Yankel avec un soupir.

— Impossible ! dit un autre juif.

Les trois juifs se regardèrent en silence.

— Si l’on essayait pourtant, dit le troisième, en jetant sur les deux autres des regards timides, peut-être, avec l’aide de Dieu…

Les trois juifs se remirent à causer dans leur langue. Boulba, quelque attention qu’il leur prêtât, ne put rien deviner ; il entendit seulement prononcer souvent le nom de Mardochée, et rien de plus.

— Écoute, mon seigneur ! dit Yankel, il faut d’abord consulter un homme tel, qu’il n’a pas encore eu son pareil dans le monde : c’est un homme sage comme Salomon, et si celui-là ne fait rien, personne au monde ne peut rien faire. Reste ici, voici la clef, et ne laisse entrer personne.

Les juifs sortirent dans la rue.

Tarass ferma la porte et regarda par la petite fenêtre, dans cette sale rue de la Juiverie. Les trois juifs