visiblement morose et chagrin. Trois rides profondes avaient creusé son front, où elles restèrent désormais. Quand il jeta les yeux autour de lui, tout lui parut nouveau dans la setch. Tous ses vieux compagnons étaient morts ; il ne restait pas un de ceux qui avaient combattu pour la sainte cause, pour la foi et la fraternité.
Ceux-là aussi qui, à la suite du kochévoï, s’étaient mis à la poursuite des Tatars, n’existaient plus ; tous avaient péri : l’un était tombé au champ d’honneur ; un autre était mort de faim et de soif au milieu des steppes salées de la Crimée ; un autre encore s’était éteint dans la captivité, n’ayant pu supporter sa honte. L’ancien kochévoï aussi n’était plus, dès longtemps, de ce monde, ni aucun de ses vieux compagnons, et déjà l’herbe du cimetière avait poussé sur les restes de ces Cosaques, autrefois bouillonnants de courage et de vie. Tarass entendait seulement qu’autour de lui il y avait une grande orgie, une orgie bruyante : toute la vaisselle avait volé en éclats ; il n’était pas resté une goutte de vin ; les hôtes et les serviteurs avaient emporté toutes les coupes, tous les vases précieux, et le maître de la maison, demeuré solitaire et morne, pensait que mieux eût valu qu’il n’y eût pas de fête. On s’efforçait en vain d’occuper et de distraire Tarass ; en vain les vieux joueurs de bandoura à la barbe grise défilaient, par deux et par trois devant