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si elle ne se fût jamais allumée. Il ne voyait plus devant lui que son terrible père.

— Eh bien ! qu’allons-nous faire maintenant ? dit Tarass, en le regardant droit entre les deux yeux.

Andry ne put rien répondre, et resta les yeux baissés vers la terre.

— Eh bien, fils, tes Polonais t’ont-ils été d’un grand secours ?

Andry demeurait muet.

— Ainsi trahir, vendre la religion, vendre les tiens… Attends, descends de cheval.

Obéissant comme un enfant docile, Andry descendit de cheval et s’arrêta, ni vif ni mort, devant Tarass.

— Reste là, et ne bouge plus. C’est moi qui t’ai donné la vie, c’est moi qui te tuerai, dit Tarass.

Et, reculant d’un pas, il ôta son mousquet de dessus son épaule. Andry était pâle comme un linge. On voyait ses lèvres remuer, et prononcer un nom. Mais ce n’était pas le nom de sa patrie, ni de sa mère, ni de ses frères, c’était le nom de la belle Polonaise.

Tarass fit feu.

Comme un épi de blé coupé par la faucille, Andry inclina la tête, et tomba sur l’herbe sans prononcer un mot.

Le meurtrier de son fils, immobile, regarda longtemps le cadavre inanimé. Il était beau même