il s’était soustrait aux poursuites par une course de deux jours et de deux nuits. Son cheval était mort de fatigue ; il en avait pris un autre, l’avait encore tué, et sur le troisième enfin il était arrivé dans le camp des Zaporogues, ayant appris en route qu’ils assiégeaient Doubno. Il ne put qu’annoncer le malheur qui était arrivé ; mais comment était-il arrivé, ce malheur ? Les Cosaques demeurés à la setch s’étaient-ils enivrés selon la coutume zaporogue, et rendus prisonniers dans l’ivresse ? Comment les Tatars avaient-ils découvert l’endroit où était enterré le trésor de l’armée ? Il n’en put rien dire. Le Cosaque était harassé de fatigue ; il arrivait tout enflé ; le vent lui avait brûlé le visage, il tomba sur la terre, et s’endormit d’un profond sommeil.
En pareil cas, c’était la coutume zaporogue de se lancer aussitôt à la poursuite des ravisseurs, et de tâcher de les atteindre en route, car autrement les prisonniers pouvaient être transportés sur les bazars de l’Asie Mineure, à Smyrne, à l’île de Crète, et Dieu sait tous les endroits où l’on aurait vu les têtes à longue tresse des Zaporogues. Voilà pourquoi les Cosaques s’étaient assemblés. Tous, du premier au dernier, se tenaient debout, le bonnet sur la tête, car ils n’étaient pas venus pour entendre l’ordre du jour de l’ataman, mais pour se concerter comme égaux entre eux.