— Votre Excellence, avais-je l’intention de lui répondre ; ne me faites pas couper la tête, ou bien, si vous voulez me faire couper la tête[1], faites-le vous-même, avec votre main de fille de général. —
Mais, que diable ! ma langue tourna dans ma bouche, et je ne dis que ces mots :
— Non, mademoiselle. —
Elle me regarda, regarda les livres, et laissa tomber son mouchoir. Je m’élançai aussitôt pour le ramasser, mais je glissai sur ce maudit parquet, et manquai de me casser le nez. Je repris toutefois l’équilibre, et lui présentai son mouchoir. Ô saints du paradis ! quel mouchoir ! un mouchoir de batiste, et si fin ! de l’ambre, de l’ambre véritable. Il sent son général. Elle remercia, et sourit légèrement, en remuant à peine ses lèvres de sucre ; puis elle s’en alla. Moi, je restai encore assis pendant une heure, quand un laquais vint et me dit :
— Allez-vous-en, Axenti Ivanowitch, le maître est déjà parti. —
Je ne puis pas souffrir les laquais. Ils sont toujours là, étalés dans l’antichambre, et ne se donnent pas même la peine de saluer par un petit signe de tête. C’est peu encore. Une fois, l’un de
- ↑ Allusion à l’ancienne formule de supplique qu’on employait en parlant aux tzars : « N’ordonnez pas de me couper la tête, mais permettez-moi de parler. »