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en droit d’envoyer à leur place quand il s’agissait de balayer l’écurie ou d’apporter de l’eau, même ce pauvre petit garçon resta la bouche ouverte comme tous les autres.

Dans ce moment, une femme encore assez jeune vint à passer, vêtue d’un habit qui lui serrait sa taille ferme et rebondie. C’était l’aide de la vieille cuisinière, une grande coquette, qui attachait toujours à son justaucorps, avec des épingles, un morceau de ruban, un clou de girofle, ou même une bribe de papier, à défaut d’autre chose.

— Bonjour, Thomas, dit-elle en apercevant le philosophe.... Aïe, aïe, que t’est-il arrivé ? s’écria-t-elle tout à coup en frappant des mains.

— Quoi donc, sotte femme ?

— Ah ! mon Dieu ! tu es devenu tout gris.

— Eh ! eh ! mais elle dit vrai, s’écria Spirid en regardant avec attention ; tu as grisonné comme notre vieux Iavtoukh. —

À ces mots, le philosophe se précipita dans la cuisine, où il avait remarqué un petit morceau triangulaire de miroir, tout sali par les mouches, autour duquel étaient suspendues toutes sortes de fleurs fanées, preuve qu’il appartenait à la coquette. En effet, il s’aperçut avec épouvante qu’une partie de ses cheveux étaient devenus blancs. Thomas Brutus laissa tomber sa tête, et réfléchit profondément.