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jour, jadis couvertes d’or, étincelaient par places, car la dorure était tombée en maint et maint endroit. Les visages des saints étaient devenus complètement noirs ; on ne distinguait plus que leur regard sombre et lugubre. Le philosophe jeta encore une fois les yeux de tous côtés.

— Eh bien, quoi, dit-il, qu’y a-t-il à craindre ? nul homme ne peut venir ici, et contre les morts et les revenants j’ai de telles prières que je n’ai pas peur qu’ils me touchent du bout du doigt. Ce n’est rien, répéta-t-il en faisant un geste de résolution, nous lirons les prières. —

En approchant de l’un des kliros[1], il y aperçut quelques paquets de cierges.

— C’est bien, pensa le philosophe ; il faut éclairer l’église de façon qu’on y puisse voir comme en plein midi. Quel dommage qu’on ne puisse pas fumer dans une église ! —

Et il se mit à coller des cierges à toutes les corniches, les balustrades et les images, sans les ménager. Bientôt toute l’église se remplit de lumière. Il sembla seulement que les ténèbres devenaient encore plus profondes dans le haut, et de leurs vieux cadres curieusement découpés, les images se mirent à jeter des regards encore plus farouches. Il s’approcha du cercueil, regarda avec terreur le

  1. Petits chœurs latéraux où se tiennent les chantres.