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naires qu’il avait ouï conter agissaient sur son imagination. Peu à peu, les ombres portées par les arbres et les haies commençaient à s’éclaircir ; le pays devenait plus découvert. Après avoir franchi un vieux pan de mur qui se trouvait devant l’église, ils entrèrent dans une petite cour. Derrière l’église on ne voyait plus un seul arbre, et devant eux s’étendait à perte de vue une campagne vide, dont les contours se perdaient dans l’obscurité de la nuit. Les trois Cosaques montèrent avec Thomas les degrés rapides du perron, et entrèrent dans l’église. Puis ils y laissèrent le philosophe, après lui avoir souhaité d’accomplir heureusement sa tâche, et l’enfermèrent à double tour, suivant l’ordre du seigneur.

Le philosophe resta seul. Il commença par bâiller une bonne fois, puis il étendit les bras et souffla dans ses mains dont il se couvrait le visage. Cela fait, il se mit à examiner l’église. Au beau milieu, se trouvait le cercueil, tout noir. Les cierges, avec leurs mèches rougeâtres, brûlaient devant les sombres images des saints. Leur lumière éclairait l’iconostase[1] et se projetait un peu dans le centre de l’église. Tous les angles étaient remplis de ténèbres. L’iconostase, très-élevé, montrait une extrême vieillesse ; ses découpures à

  1. Cloison en bois, chargée de peintures byzantines, qui sépare la nef du sanctuaire.