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les fit passer subitement du rose au ponceau. Pendant cette exécution elle vomit un torrent d’affreuses paroles, et elle ordonna à ses valets de mener à grands coups de nerfs de bœuf ce beau monsieur jusqu’à sa calèche qui se trouva être tout attelée et chargée pour la route.

Notre héros, qui semblait toucher enfin le but même de ses travaux, l’objet innocent et louable de ses expéditions : se marier, acquérir de beaux domaines, y enrichir ses vassaux, s’y livrer aux délices de la vie champêtre au sein d’une aimable famille née de lui, et conquérir, à force de sagesse, d’ordre et de prudence, la considération et l’estime de tout le monde, devait passer encore par les mains de bien des hommes pervers. Ce fut d’abord dans celles d’un hobereau, ennemi personnel du général Bétrichef et à qui il eut le malheur de nommer ce général. Ce gentilhomme extravagant, forcené, arrivé, d’excès en excès, au comble de la démence, entraîna chez lui notre héros et le contraignit de prendre part à ces orgies suprêmes qui semblent ne pouvoir jamais être suivies que de la ruine complète et de la mort du forcené. Celui-ci força Tchitchikof, sous peine de la vie, de boire plus de vins spiritueux, en deux heures de temps, qu’il n’en avait bu depuis trente années entières, et ensuite il le fit assaillir de baisers par cinquante hommes, et, immédiatement après, par cinquante femmes de son obéissance.

Après cette épreuve, la plus terrible qu’il eut subie, échappé aux obsessions dangereuses de ce tyranneau steppien, il alla, quelques jours après, par suite de la perte d’un de ses chevaux, tomber chez un seigneur maquignon qui lui fit faire de force une course en télègue avec des chevaux fougueux, et il est presque incroyable qu’il n’ait pas perdu la vie dans cette nouvelle épreuve. Plus tard, un très-grand seigneur, un prince anglomane, tout infatué de haras et de sport, lui fit jouer tout un jour un rôle ridicule en le forçant à adopter une manie chevaline à laquelle son physique le rendait impropre. Toutefois, sur l’avis qu’il reçut de ce seigneur, il se rendit dans une localité voisine pour visiter un domaine qui était à vendre.