Page:Gogol - Les Âmes mortes, tome 2, trad Charrière, 1859.djvu/154

Cette page a été validée par deux contributeurs.


CHANT XV.

DEUX ORIGINAUX, CHACUN DANS SON GENRE.


Notre héros en superbe équipage est égaré par la faute de ses gens. — Scènes de pêche. — Un gentilhomme qui flotte en balise sans danger de sombrer. — Riche coup de filet qu’il semblait lui-même convoyer à fleur d’eau. — Le hobereau-balise se trouve être un fieffé viveur. — L’intérieur et les fils de ce gentilhomme ; leur perspective d’avenir. — Un convive survient. Joie de l’amphitryon. Dîner pantagruélique — Contraste : Péetoukhof qui vit trop, Platônof qui vit trop peu. — Notre héros est frappé de la disposition spleenique de ce dernier et y prend assez d’intérêt pour lui faire une gracieuse proposition. Il est convenu qu’ils vont partir ensemble et voyager de conserve. — Leur hôte les retient de force pour vingt-quatre heures encore. — Manière dont il emploie son reste de soirée dès que ses convives se sont retirés. — Emploi du jour suivant : promenade sur l’eau, chants. — Les pêcheurs à la fin de leur journée. — Départ de Platônof en compagnie de Tchitchikof, qui consent à passer chez la sœur et le beau-frère de son compagnon. — Mme Constànjoglo est d’abord seule à la maison. Le mari rentre peu après, suivi d’un groupe de campagnards qu’il congédie. — Tchitchikof est touché de l’harmonie qui règne dans cette maison, dans ce ménage, dans ce beau domaine. — Il désire s’instruire des moyens par lesquels on aménage un bien de manière à lui faire produire le double et le triple de ce que donnent les terres voisines. — Mais un devoir impérieux l’oblige à faire une excursion chez le colonel Kochkaref.


« Si le colonel Kochkaref est véritablement fou, il n’y a pas de mal à ça , marmotta Tchitchikof aussitôt qu’il se vit seul en rase campagne au milieu de plaines immenses où il n’apercevait plus, au-dessus du vert doré des champs et des prés, que l’azur de la voûte sans fond, et le gris mêlé des quelques nuages lointains. Séliphane, Séliphane ! tu as bien demandé, n’est-ce pas, par quel chemin on arrive chez le colonel ?

— Moi ? impossible ; j’ai eu tant de mal avec cette calèche qui était rouillée, poudreuse, remplie de toiles d’araignée ; il a fallu épousseter, laver, graisser, vernisser…, lui faire une toilette bien en règle, allez, pour la remettre dans