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pouvoir les contempler un peu à loisir. En lui commencèrent aussitôt à renaître des impressions qui semblaient devoir être effacées depuis longtemps. Il y avait une foule de localités qu’il avait en effet tout à fait oubliées, et il regarda, avec toute la curiosité d’un nouveau venu, des points de vue d’une beauté merveilleuse. Et voilà que tout à coup, on ne sait pourquoi, son cœur se mit à battre, quand, la route se creusant en ravin dans le fourré d’une partie de la forêt, fort enchevêtrée et composée d’arbres gigantesques aux formes tourmentées, il regarda en haut et en bas, au-dessus et au-dessous de lui, des chênes séculaires que pourraient à peine embrasser trois hommes, qu’il vit une clairière bordée de mélèzes, d’ormes et de platanes, que dominaient les cimes de beaux peupliers. Il demanda quel était le propriétaire de ce bois, et on lui répondit en le nommant lui-même.

Sorti des fourrés, il vit la route s’engager dans les prairies, égayées çà et là par de jolis bocages de frênes, de jeunes et de vieux ifs, en vue d’une longue suite de hauteurs dont l’approche faisait de minute en minute changer les aspects, d’autant plus que le chemin sinueux déviait tantôt à droite tantôt à gauche ; et quand il demandait à quelque paysan à qui étaient ces prairies et tous ces monticules, on lui répondait toujours : « À Téntëtnikof…. » La route s’élevait ensuite sur des versants et coupait des plateaux ; André Ivanovitch longeait d’un côté des seigles, des froments et des orges, de l’autre, l’ensemble, réduit en miniature des lieux qu’il venait de parcourir. Bientôt s’obscurcissant peu à peu, sa route entra et se plongea sous l’ombre d’arbres vigoureux, échevelés, également espacés, à la lisière d’immenses tapis verts, étendus jusqu’à des hameaux ; leurs chaumières filaient comme des ombres, aux regards distraits par l’apparition des toits rouges de l’habitation domaniale, au-dessus desquels se mirent à resplendir cinq coupoles dorées. Soudain le cœur du jeune homme s’inonda de chaleur et battit à tout rompre dans sa poitrine : c’est que, sans qu’il lui fût nécessaire de demander où il était, ses sensations et ses pensées, se pres-