Page:Gogol - Les Âmes mortes, tome 1, trad Charrière, 1859.djvu/169

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

gneur ainsi qu’eux, et cela, nommément, en le frappant de verges.

— Vous mentez ! Je n’ai de ma vie aperçu nulle part ce M. Maximof dont vous parlez.

— Mon très-honoré monsieur, permettez-moi de vous faire observer que je suis un ancien militaire, officier ou fonctionnaire public, et justement, à cette heure, dans l’exercice de mes fonctions. Le mot que vous venez d’employer là, vous pouvez sans doute le dire à quelqu’un de vos serfs et non pas à moi. »

Nozdref fit un haut-le-corps superbe ; ses lèvres serrées et son regard braqué fixement sur le magistrat pouvaient faire redouter un éclat, mais sans grande conséquence pour les témoins.

Cependant Tchitchikof n’éprouva nullement la curiosité de voir ce qu’allait répondre son hôte et ami ; satisfait de la diversion, il alla tout doucement s’emparer de son chapeau, puis il se glissa, se dissimula derrière l’édile imperturbable, gagna l’antichambre, le perron, la cour, sauta dans sa britchka, et ordonna à Séliphane de prendre le large, puis de lancer ses chevaux à toute vitesse.