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210 LE MARIAGE

l'exprimer... il n'y a pas de mots... (Après un certain silence.) Hum! j'ai beau dire... Mais une certaine épouvante me saisit lorsque je pense sérieusement à tout cela. Je me lie pour toute une vie, pour tout un siècle, quoi qu'il arrive... après, plus d'échappatoire, plus de regret, rien, rien... tout est fini, tout est accompli. Même maintenant, impossible de reculer, de rebrousser chemin... dans une minute, le serment éternel... impossible de fuir, la voiture est déjà com- mandée ...Ah! ça, mais... est-ce que vraiment je ne • pourrais me sauver?... Évidemment, je ne puis pas... Des gens aux portes, partout... on me demandera ce que je fais... Impossible, inutile... Tiens, la fenêtre est ouverte... Si je... Non, comment le ferais- je... c'est indécent et vraiment trop haut ! (Il s'approche de la fenêtre.) Oh ! ce n'est pas bien haut, rien que le sou- bassement et il est si petit... Oh ! non, je n'ai pas ma casquette... Comment partir sans chapeau? C'est gênant ! Oh ! ne peut-on vraiment s'en aller sans chapeau?... Et si j'essayais, hein?... Vais-je essayer?.. oui ! (Il monte sur la fenêtre, crie : « Seigneur, bénis- moi! » et saute dans la rue. On entend ses soupirs et ses gémissements derrière la scène.) Ah ! que c'était haut ! Eh ! cocher !

Voix du cocher. — Où allez-vous?

Voix de Podkoliossine. — A la Kanavka, près du pont de Semenoff.

Voix du cocher. — Dix kopecks, ça va !

Voix de Podkoliossine. — Va ! En route !

(On entend le bruit de la voiture.)

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