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14 LE RÉVIZOR

Le directeur des postes. — Je sais... je sais... inutile de me donner des leçons... Je ne l'ai jamais fait par prudence, mais par simple curiosité... je meurs d'envie d'apprendre ce qui se passe dans le monde... Vous n'avez pas idée de l'intérêt de ces lectures... Il y a des jours où c'est une véritable jouissance... des détails d'une saveur!... et pour ce qui est d'être renseigné... je vous jure que ça vaut les Moskovskia Viédomosti... et autres feuilles de Moscou !

Le préfet. — Mais alors... dites-nous si vous avez appris quelque chose sur ce fonctionnaire de Petrograd?

Le directeur des postes. — Rien qui concerne celui-là... mais on parle beaucoup d'un certain fonc- tionnaire de Kostroma... Je regrette que vous ne lisiez pas ces lettres... il y a des passages palpitants... Ainsi, récemment... un lieutenant écrivait à son ami... à propos d'un bal sur un ton très enjoué... magni- fique, mon cher, écoutez-moi ça : « Ma vie s'écoule comme dans un paradis... des jeunes filles en veux-tu, en voilà... de la musique tout le temps et des jeux... » et tout cela décrit avec un sentiment!... J'ai gardé cette lettre chez moi... exprès... Si vous voulez, je vous la lirai...

Le préfet. — Il s'agit bien de cette lettre, aujour- d'hui ! Alors, je compte sur vous, Ivan Kouzmitch... dès que vous tomberez sur une plainte ou une dénon- ciation, interceptez sans la moindre hésitation...

Le directeur des postes. — Avec grand plaisir.

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