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I48 LE MARIAGE

Podkoliossine. — D'étrange?... Célibataire jusqu'à ce jour... et puis... brusquement marié!... Mais...

Kotchkariof. — La belle histoire !... Et tu n'as pas honte? Mon cher... il faut s'y prendre sérieuse- ment avec toi, comme je vois... et je te parlerai fran- chement, comme un père à son fils... Tiens... vois... regarde-toi comme dans une glace, avec attention... vois, par exemple, avec quel air tu me regardes... Mon pauvre ami, tu ne ressembles à rien, à rien du tout... Tout au plus à une bûche... qui ne vaut pas grand '- chose... Veux-tu me dire ce que tu fiches sur terre?... Contemple-toi dans la glace... Qu'est-ce que tu y vois?... ton air stupide et c'est tout... Tandis que... réfléchis donc... tu auras autour de toi des enfants... et ni deux, ni trois, mais une demi-douzaine de mioches qui te ressembleront comme deux gouttes d'eau! Aujourd'hui tu es seul... conseiller de cour, chef expéditionnaire, est-ce que je sais moi... et demain, mon cher... toute une kyrielle de bambins expéditionnaires, de petites canailles, de polissons qui viendront fourrager les poils de ta barbe... et toi... tu leur répondras comme si tu jappais, ainsi... « Av, av, ouaou !... » Y a-t-il quelque chose de meilleur dans la vie... hein? Dis...

Podkoliossine. — Ce seront de vrais petits diables... ils casseront tout ici et disperseront mes papiers...

Kotchkariof. — Ils feront les diablotins... mais ils te ressembleront, mon ami... la belle affaire !

Podkoliossine. — Vraiment drôle, en effet... un petit marmot, pas plus haut qu'une botte... et qui te ressemble...

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