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Je n’ai trouvé ici qu’une seule créature qui mérite le nom de femme, mademoiselle de B… Elle vous ressemble, Charlotte, si l’on peut vous ressembler. Oh ! dites-vous, il se mêle aussi de faire des compliments ! Cela n’est pas tout à fait faux. Depuis quelque temps je suis fort aimable, parce que je ne puis être autre chose : je fais de l’esprit, et les femmes disent que personne ne sait louer plus joliment que moi (ni mentir, ajoutez-vous, car l’un ne va pas sans l’autre). Je voulais vous parler de mademoiselle de B…. Elle a beaucoup d’âme, et cette âme perce tout entière à travers ses yeux bleus. Son rang lui est à charge ; il ne contente aucun des désirs de son cœur. Elle aspire à se voir hors du tumulte, et nous passons quelquefois des heures entières à nous figurer un bonheur sans mélange, au milieu de scènes champêtres, Charlotte toujours avec nous. Ah ! combien de fois n’est-elle pas obligée de vous rendre hommage ! Elle le fait volontiers : elle a tant de plaisir à entendre parler de vous ! Elle vous aime.

Oh ! si j’étais assis à vos pieds dans votre petite chambre favorite, tandis que les enfants sauteraient autour de nous ! Quand vous trouveriez qu’ils feraient trop de bruit, je les rassemblerais tranquilles auprès de moi en leur contant quelque effrayant conte de ma mère l’Oie.

Le soleil se couche majestueusement derrière ces collines resplendissantes de neige. La tempête s’est apaisée. Et moi… il faut que je rentre dans ma cage. Adieu !