pour compagne là grâce du moment, et chacun, en la douce présence, se croit pour un moment le favori du destin. Moi. ce conseil m’épouvante de m 1 éloigner de toi, et que me sert d’apprendre cette haute sagesse ? —
Maintenant je suis loin ! Que ferai-je a l’heure actuelle ? je ne le saurais dire. Elle était pour moi si bonne et si belle ! c’est trop de regrets, je veux m’y soustraire ! Une ardeur insurmontable me travaille et m’agite, et nul conseil ne me reste que des larmes sans fin !
Ruisselez-donc et coulez sans que rien vous arrêta allez, jamais il ne vous arrivera d’étouffer la flamme intérieure ; le ravage déjà se met dans ma poitrine, ou la vie et la mort se livrent un affreux combat. Il y aurait bien des simples pour apaiser les tortures du cœur, mais la résolution manque a mon esprit, la volonté.
Il ne saurait se faire a l’idée de se passer d’elle ! Il multiplie son image par mille ; tantôt il la sent palpiter, tantôt il l’arrache, indécise à présent, tout à l’heure inondée de lumière. Quelle consolation si faible espérer dans ce flux et reflux, cette allée et venue ?
Abandonnez-moi ici, mes compagnons fidèles ! laissezmoi seul au pied de la roche, dans la mousse et dans les bruyères. Courage ! le monde vous est ouvert, la terre est vaste, le ciel large et sublime. Contemplez, creusez, analysez, becayez les secrets de la nature.
Quant à moi, j’ai tout perdu, je suis perdu pour moi-même, moi naguère encore le favori des dieux. Ils ont voulu m’éprouver, ils m’ont donne Pandore, si riche en trésors, mais plus riche en périls ; ils m’ont presse sur sa lèvre prodigue, ils m’en arrachent et me poussent a l’abîme.