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homme désintéressé qui, par amour pour l’art en général, veuille lui faire le sacrifice de son individualité.

Ajoutez à cela que l’on produit les choses les plus pitoyables, sans s’en douter. Les enfants font déjà des vers ; jeunes gens ils s’imaginent être quelque chose, jusqu’à ce qu’enfin, devenus hommes, ils ouvrent les yeux, comprennent les chefs-d’œuvre, et s’effraient d’avoir perdu leurs meilleures années dans une fausse direction.

D’autres même n’arrivent jamais à se faire une idée de la perfection et à reconnaître leur insuffisance. Ils produisent des choses médiocres jusqu’à la fin. Il est certain que si chacun pouvait arriver assez tôt à reconnaître tous les chefs-d’œuvre dont le monde est rempli, et ce qu’il faudrait pour produire quelque chose digne d’être mis à côté de ces ouvrages, sur cent jeunes gens qui s’occupent de poésie, à peine un seul se sentirait assez de courage, de talent et de persévérance pour continuer à