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Le malheur de notre société est qu’au lieu de vivre et de jouir de ce qu’il possède, chacun veut gouverner. Il en est de même dans l’art ; au lieu de jouir des œuvres que nous possédons, chacun, de son côté, veut aussi produire. Personne ne songe à se frayer une route indépendante par une œuvre originale de poésie ; on tourne sans cesse dans le même cercle.

Il n’y a pas non plus d’efforts sérieux pour arriver à un ensemble. Chacun ne pense qu’à se faire remarquer, à mettre en évidence son individualité. Cette fausse tendance se montre partout, et on imite en cela nos modernes virtuoses, qui ne choisissent pas pour leur exécution des morceaux capables de procurer aux auditeurs une véritable jouissance musicale, mais plutôt ceux dans lesquels l’exécutant peut faire admirer son habileté acquise. C’est partout l’individu qui veut se montrer dans sa spendeur, et on ne trouve nulle part un