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ensemble après avoir passé une journée et une nuit avec nous.

— Il faut nous préparer de suite à les recevoir ; à peine en avons-nous le temps. Qu’en penses-tu, Ottilie ? dit Charlotte.

La jeune fille demanda à sa tante quelques instructions générales sur ses intentions, et s’éloigna aussitôt pour les faire exécuter.

Le Capitaine profita de son absence pour demander à Charlotte et à son mari quels étaient ces deux personnages qu’il ne connaissait que de nom. Les époux lui apprirent que le Comte et la Baronne, quoique mariés chacun de leur côté, n’avaient pu se voir sans s’aimer passionnément. Cet amour, qui avait troublé deux ménages, avait causé tant de scandale, que le divorce était devenu nécessaire. La Baronne seule avait pu l’obtenir, et le Comte s’était vu forcé de rompre avec elle, en apparence du moins, car s’il ne pouvait plus la voir en ville et à la cour, il se dédommageait de cette privation aux eaux et pendant les voyages auxquels il consacrait la plus grande partie de sa vie.

Si Édouard et sa femme n’approuvaient pas entièrement cette conduite, ils ne se sentaient pas le courage de condamner des personnes avec lesquelles ils étaient liés depuis leur première jeunesse, aussi avaient-ils conservé avec elles des relations de bonne amitié. En ce moment cependant leur arrivée au château causa à Charlotte une vague inquiétude, dont sa nièce était l’objet involontaire ; car elle craignait l’influence qu’un pareil exemple pourrait exercer sur l’esprit de cette enfant. Édouard aussi était peu satisfait de cette visite, mais pour des causes bien différentes.

— Ils auraient mieux fait de venir quelques jours plus