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et mes peupliers. Voyez comme ils se groupent délicieusement autour de l’étang du milieu. Tous ces beaux arbres, ajouta-t-il en se penchant à l’oreille d’Ottilie, je les ai plantés moi-même.

— En ce cas, ils sont encore bien jeunes.

— Ils ont à peu près votre âge. Oui, chère Ottilie, je plantais déjà lorsque vous n’étiez encore qu’au berceau.

Un dîner splendide avait été préparé au château ; les convives y firent honneur. En sortant de table l’on fut visiter le village, où, d’après les ordres du Capitaine, chaque famille s’était réunie sur le seuil de sa demeure : les vieillards étaient assis sur des bancs neufs, et les jeunes gens se tenaient debout sous les arbres nouvellement plantés, comme si le hasard seul les eût groupés ainsi. Il était impossible de ne pas admirer la métamorphose subite qui, d’un hameau sale, pauvre et irrégulier, avait fait un village où tout respirait la propreté, l’ordre et l’aisance.

Lorsque les invités se furent retirés, et que nos quatre amis se retrouvèrent seuls dans la grande salle que quelques instants plus tôt une société bruyante avait encombrée, ils respirèrent plus librement ; car un petit cercle que des affections sincères ont formé, souffre toujours quand une société nombreuse le force à s’étendre. Leur satisfaction cependant ne fut pas de longue durée, le Baron reçut une lettre qui lui annonçait de nouveaux hôtes.

— Le Comte arrive demain, s’écria-t-il après avoir lu cette lettre.

— En ce cas la Baronne n’est pas loin, répondit Charlotte.

— Elle arrivera deux heures après le Comte, et ils partiront