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effets de vos mystérieuses affinités. Maintenant, mon ami, continua-t-elle en s’adressant à son mari, reprends ta lecture, je l’écouterai avec plus d’intérêt qu’avant cette digression.

— Puisque tu l’as provoquée, répondit Édouard en souriant, tu ne la termineras pas si vite. Il me reste à te parler des cas les plus compliqués et qui sont les plus intéressants. C’est par eux que l’on apprend à connaître les divers degrés des affinités et leurs rapports plus ou moins puissants ou faibles, plus ou moins intimes ou éloignés. Oui, les affinités ne sont réellement intéressantes que lorsqu’elles opèrent des séparations, des divorces.

— Ces vilains mots, que l’on entend trop souvent prononcer dans le monde, figurent donc aussi dans le vocabulaire de la chimie ?

— Sans doute, et cette science elle-même, lorsque la langue allemande n’avait pas encore adopté la foule de mots étrangers dont elle se sert aujourd’hui, s’appelait l’art de séparer (scheidekunst).

— On a bien fait de lui donner un autre nom, et, pour ma part, je préférerai toujours l’art d’unir à celui de séparer. Mais voyons, puisque vous le voulez, Messieurs, citez-moi un exemple de ces malheureuses affinités qui engendrent des divorces.

— Nous continuerons à cet effet, dit le Capitaine, à vous citer les exemples dont nous nous sommes déjà servis. Ce que nous appelons pierre calcaire, n’est qu’une terre calcaire plus ou moins pure et très-étroitement unie à un acide subtil que nous ne pouvons saisir que sous la forme d’air. En mettant un morceau de cette pierre dans de l’acide sulfureux liquéfié, cet acide s’empare de la chaux et se métamorphose avec elle en plâtre,