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Ottilie refusa positivement, mais elle lui fit signe de prendre dans sa commode tout ce qu’elle y trouverait à son goût. Charmée de cette permission, elle en usa avec autant d’indiscrétion que de maladresse, et courut aussitôt montrer son butin à tous les domestiques du château.

Pendant ce temps, Ottilie replaça si adroitement tous les dons d’Édouard dans le riche coffre, qu’ils ne paraissaient pas avoir été dérangés. Puis elle ouvrit le tiroir secret placé dans le couvercle, qui contenait divers billets d’Édouard, une boucle de ses cheveux, des fleurs sèches qu’ils avaient cueillies ensemble dans des moments de bonheur et d’espérance, et plusieurs autres souvenirs de ce genre. Elle y ajouta le portrait de son père, ferma le tiroir et le coffre, et passa son élégante clef à une petite chaîne d’or qu’elle portait au cou.

Les changements survenus dans les allures d’Ottilie, avaient fait naître les plus heureuses espérances chez ses amis. Charlotte surtout était convaincue que le jour de la fête d’Édouard elle se remettrait à parler, car elle avait cru reconnaître dans son sourire la joie secrète qu’on cherche vainement à cacher quand on prépare une heureuse surprise aux objets de ses affections. Personne ne savait que la pauvre enfant passait des heures entières dans un état voisin de l’anéantissement, et que la force qui la soutenait en présence de ses amis était factice.

Mittler venait souvent au château et s’y arrêtait plus longtemps qu’à l’ordinaire. Cet homme opiniâtre savait qu’il est des moments où l’exécution des projets les plus difficiles devient facile. Le refus d’Ottilie d’épouser Édouard et le silence qu’elle s’obstinait à g